2017

La Grâce
Exposition collective à l'église de la Jaillette à Louvaine sur le thème de la grâce.

La grâce du grec charis, veut dire la joie. Dans la religion chrétienne, la grâce est gratuite, c’est un cadeau, c’est heureux et joyeux.

La vision que j’essaie de donner de la grâce, dans ce diptyque, tente d’exprimer une certaine beauté du monde, de la nature, des bêtes et des créatures terrestres. Elle évoque une vision proche de l’animisme. Mais encore faudrait-il s’entendre sur le mot « beauté ». Le terme est galvaudé et son usage périlleux, notamment lorsqu’il évoque le but recherché de la création artistique. On pourrait lui préférer « puissance, force, liberté ». En se laissant porter par cette liberté, on entrevoit la beauté là où on ne l’attend pas. « La grâce c’est ce qui retire l’écaille de mes yeux pour voir dans le monde ce qui est beau ». Serait-ce un dévoilement ?

La grâce, en art correspond pour moi à la faculté de « dire » ou de montrer des choses qui sont plus que ce qu’elles sont. Elle révèle un mystère sans que l’on puisse l’épuiser ou le réduire à un seul élément, à un seul sens. C’est un mouvement qui porte à voir dans l’objet quelque chose qui touche à son intimité.

Je voudrais exprimer ce mouvement, qui porte les traits d’une transformation de la matière et de la couleur en un paysage, une créature, une étendue d’eau… sans que ceux-ci ne soient réduits à ces seuls éléments figuratifs. En d’autre terme, la figure dit plus que ce qu’elle représente, justement car elle oscille entre représentation et texture, image et matière. Grâce à cette matière, l’image d’un seul coup s’incarne, se charge d’une présence énigmatique.

Cette opération de transformation de la matière cherche aussi à traduire l’émerveillement que l’on peut ressentir devant le spectacle vivant du monde.

La grâce, du point de vu de l’acte créateur, c’est le moment de joie infime et immense à la fois où surgit le sentiment d’une conquête, au sens où l’entend Gilles Deleuze. La joie que quelque chose advienne presque à notre insu, en dehors d’une volonté consciente. Ce sont des moments où l’on est présent à soi-même et qui nous permettent de ressentir un véritable sentiment de liberté .

Lorsque le désir de faire, de créer, qui naît de l’expérience d’une incomplétude de la perception ordinaire, coïncide à l’avènement d’une forme matérielle secrètement désirée et évidente, alors nous sommes comblés. Nous avons alors affaire à un moment de grâce.

 

Julien Malardenti, juin 2017

Ils s'en remettent à la fatalité, 2017, mixte sur toiles 196 x 230 cm
Ils s'en remettent à la fatalité, 2017, mixte sur toiles 196 x 230 cm (diptyque)